Qu’est-ce que la fiscalité locale ?
La fiscalité locale regroupe l’ensemble des impôts perçus au profit des collectivités territoriales : communes, intercommunalités, départements et régions. Elle est au cœur du financement des services publics de proximité. Bien que souvent perçue comme technique ou secondaire, elle est essentielle pour comprendre comment les collectivités territoriales agissent, investissent, et assurent leurs missions. Elle reflète la diversité des compétences locales, tout en étant soumise à des évolutions profondes. Cet article propose une synthèse claire et accessible de ce qu’est la fiscalité locale, à destination des agents des collectivités, pour mieux en comprendre les ressorts, les mutations et les perspectives.

Qu’est-ce que la fiscalité locale ?
Une ressource vitale pour les collectivités locales
Le lien entre fiscalité locale et action publique territoriale
Les collectivités territoriales exercent des compétences de plus en plus larges : gestion des écoles, des transports, de la solidarité, du développement économique… Pour répondre à ces missions, elles ont besoin de financements pérennes. La fiscalité locale constitue donc une ressource centrale, car elle permet à chaque collectivité d’agir de manière autonome, dans le respect du principe de libre administration.
Cette autonomie repose sur une capacité – plus ou moins grande selon les niveaux – à voter des taux d’imposition, à percevoir des recettes et à orienter les politiques publiques locales.
Ce que la fiscalité locale finance concrètement
En pratique, la fiscalité locale finance des services essentiels au quotidien :
- Les communes : écoles primaires, urbanisme, sécurité, crèches, voirie.
- Les intercommunalités : collecte des déchets, zones d’activités, mobilité locale.
- Les départements : aide sociale, RSA, protection de l’enfance, collèges.
- Les régions : lycées, transports régionaux, développement économique.
Chaque strate territoriale agit dans son champ de compétence propre. Cela explique pourquoi la répartition des impôts locaux n’est pas homogène.
Quels sont les principaux impôts locaux ?
Une fiscalité différente de celle de l’État
Contrairement à la fiscalité d’État (TVA, impôt sur le revenu, impôt sur les sociétés), les impôts locaux sont destinés directement aux budgets des collectivités. Ils ne transitent pas par Bercy.
Ils sont répartis entre les différents niveaux de collectivités selon des clés de répartition fixées par la loi.
Parmi les principaux impôts directs locaux, on trouve :
- Les impôts payés par les ménages :
- Taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) : payée par les propriétaires de logements, commerces, bureaux...
- Taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFPNB) : pour les terrains agricoles ou non construits.
- Taxe d’habitation sur les résidences secondaires : la TH a été supprimée pour les résidences principales, mais elle subsiste sur les secondaires.
- Les impôts économiques payés par les entreprises :
- Cotisation foncière des entreprises (CFE) : calculée selon la valeur locative des locaux utilisés.
- Cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) : taxe sur l’activité économique, en voie de suppression complète d’ici 2027.
- Autres taxes spécifiques : TASCOM (commerce), GEMAPI (gestion des eaux), taxe sur les remontées mécaniques, etc.
Comment sont calculées les recettes fiscales ?
Le calcul des recettes fiscales locales repose sur trois éléments principaux :
- L’assiette fiscale :
- L'assiette fiscale est la base sur laquelle est appliqué le taux d'imposition. Elle est déterminée en fonction de la nature de l'impôt. Par exemple, pour la taxe foncière, l'assiette est la valeur locative cadastrale du bien immobilier, qui reflète le loyer théorique annuel que le bien pourrait produire s'il était loué dans des conditions normales.
- Le taux d’imposition :
- Fixé par la collectivité bénéficiaire, il peut varier selon les décisions locales. Un taux élevé sur une base large génère des recettes importantes, tandis qu'un taux bas peut être compensé par une dynamique économique favorable. L'État conserve un droit de regard sur ces taux, notamment via les dotations.
- Les abattements, exonérations et dégrèvements :
- Ces dispositifs réduisent la base ou le montant de l’impôt pour certains contribuables. Ils incluent des exonérations légales, des abattements pour charges de famille, et des dégrèvements décidés par l’État.
La formule de calcul est : Recette fiscale = Base imposable × Taux d’imposition – Exonérations et dégrèvements.
Qui perçoit quoi ? Et pourquoi ?
Chaque type de collectivité dispose de recettes fiscales adaptées à ses missions :
- Les communes touchent surtout la taxe foncière et les taxes liées à l’urbanisme. Elles les mobilisent pour financer les services du quotidien.
- Les intercommunalités perçoivent la fiscalité économique (CFE, CVAE) pour accompagner le développement local.
- Les départements, centrés sur la solidarité, dépendent des DMTO (droits de mutation), sensibles au marché immobilier.
- Les régions, sans fiscalité directe, reçoivent des fractions de TVA pour financer les lycées, les trains régionaux ou la formation professionnelle.
Cette répartition vise à aligner les recettes avec les compétences exercées. Ce sont les collectivités territoriales qui bénéficient directement de la fiscalité locale et qui affectent ces recettes à leurs dépenses locales.
Mais attention : ce ne sont pas elles qui collectent les impôts ! C’est la Direction générale des finances publiques (DGFiP) qui gère l’ensemble des opérations fiscales.
Le rôle déterminant de la DGFiP
Une administration d’État au service du local
Même si les collectivités décident des taux, c’est l’État – via la DGFiP – qui assure la liquidation, le recouvrement et la redistribution des impôts locaux :
- Les avis d’imposition sont calculés et envoyés par l’administration fiscale.
- Les contribuables paient à l’État.
- L’État reverse ensuite les recettes à chaque collectivité, en fonction des taux qu’elle a votés et des bases fiscales de son territoire.
Ce mécanisme garantit l’uniformité du système et la fiabilité des recettes, même pour les petites communes dépourvues de moyens techniques.
Elle agit ainsi comme une courroie de transmission entre les contribuables et les budgets locaux. Elle accompagne aussi les collectivités dans leurs analyses fiscales et dans le traitement des données cadastrales ou foncières.
Une fiscalité locale en pleine mutation
Une histoire de réformes successives
Depuis une quinzaine d’années, la fiscalité locale a connu de profonds bouleversements :
- Suppression de la taxe professionnelle (2010).
- Remplacement progressif de la taxe d’habitation par une part de TVA (2018–2023).
- Disparition programmée de la CVAE (2023–2027).
À chaque fois, des compensations sont promises, souvent sous forme de transferts de TVA. Mais ces recettes sont moins dynamiques et moins pilotables localement.
Une autonomie fiscale en question
À force de transferts, la part de la fiscalité « propre » (avec pouvoir de taux) se réduit. Cela affaiblit l’autonomie des collectivités, et les rend plus dépendantes des arbitrages de l’État. Ce mouvement, souvent qualifié de recentralisation fiscale, questionne la capacité des collectivités à s’autofinancer et à ajuster leurs ressources aux besoins locaux.
Les leviers d’action des collectivités
Malgré les réformes, des marges de manœuvre subsistent :
- Les collectivités peuvent voter certains taux d’imposition, dans les limites fixées par la loi (ex. : taxe foncière).
- Elles peuvent accorder ou non des exonérations ou abattements.
- Le développement de l’urbanisme et des zones économiques peut élargir leur base fiscale.
Deux commissions jouent un rôle d’appui : la Commission Communale des Impôts Directs (CCID) et la Commission Intercommunale des Impôts Directs (CIID), qui interviennent sur l’évaluation des bases foncières et la relation avec la DGFiP.
Une fiscalité de plus en plus complexe à piloter
Difficulté de prévision, volatilité des ressources
La fiscalité locale ne se résume pas à un tableau de recettes. Elle est un outil stratégique au service de la prospective financière des collectivités. Autrement dit : elle permet d’anticiper les trajectoires budgétaires, de mesurer l’effet des décisions locales (exonérations, changements de taux…) et de calibrer les politiques publiques à moyen et long terme.
Elle repose sur des bases techniques issues de multiples sources de données : fichiers fonciers (MAJIC), bases fiscales DGFiP, déclarations des contribuables, fichiers INSEE, etc.
Son pilotage nécessite une maîtrise fine du croisement de données, pour :
- Contrôler les bases fiscales
- Auditer l’équité fiscale (vérifier les déclarations)
- Identifier les marges de manœuvre (modulation de taux, exonérations, compensations)
- Optimiser la gestion des CCID/CIID (commissions chargées des évaluations fiscales)
💡 C’est dans ce contexte que se développent des outils comme les observatoires fiscaux, qui permettent une vision transversale, analytique et stratégique de la fiscalité locale.
Le pilotage fiscal devient plus difficile : certaines recettes comme les DMTO ou la TVA sont volatiles et peu prévisibles. Les bases fiscales peuvent être impactées par des réformes, des exonérations ou des évolutions économiques locales.
L’importance d’un observatoire fiscal local
Pour répondre à ces enjeux, des collectivités mettent en place un observatoire fiscal : un outil d’analyse stratégique des données fiscales locales. Il permet de :
- Suivre l’évolution des bases et produits.
- Identifier des zones à enjeu fiscal.
- Anticiper l’impact des réformes.
- Objectiver les décisions fiscales locales.
C’est un levier précieux pour reprendre la main sur un sujet souvent jugé technique, mais central.
Conclusion : quel avenir pour la fiscalité locale ?
La fiscalité locale n’est pas une simple mécanique de prélèvement : c’est un instrument de pilotage stratégique pour les collectivités. Elle garantit leur capacité à investir, à innover, à répondre aux besoins de la population.
Elle est aujourd’hui à un tournant. Si elle reste un pilier de l’autonomie des collectivités, les réformes récentes ont érodé leur pouvoir fiscal.
Face à ces mutations, les collectivités doivent renforcer leur maîtrise de la donnée fiscale à travers des outils d’analyse, optimiser les marges de manœuvre existantes (taux, exonérations, audits), et préserver leur autonomie budgétaire pour continuer à répondre aux attentes des citoyens.
Demain, la fiscalité locale devra sans doute être repensée pour conjuguer justice territoriale, efficacité budgétaire et autonomie démocratique.
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